top of page

Menaces de fermeture et grèves

Les années 20-30 sont difficiles pour la verrerie

​

En 1927, la verrerie de Souvigny est menacée de fermeture. Les ouvriers ont accepté deux diminutions de salaire successives, mais cela n’a pas suffi pour éviter le chômage. L’Union syndicale départementale et la Bourse du Travail de Moulins sollicitent donc le préfet afin qu’il intervienne auprès de l’administration des Ponts et Chaussées, pour que cette dernière ouvre des travaux à proximité de Souvigny, permettant d’occuper les verriers.

​

En 1934 de nouveau la verrerie connaît une situation difficile : d’après le rapport de gendarmerie daté du 21 décembre 1934, faute de commandes, la verrerie chôme un jour par semaine depuis le premier décembre, et fermera à compter du 31 décembre, en licenciant tout le personnel payé à la journée : « Le personnel payé au mois et quelques rares privilégiés chargés de l’entretien des fours resteront embauchés. Â» Cependant la faillite est évitée.

Le rapport de gendarmerie mentionne le fait que certains verriers ont cherché de l’embauche dans d’autres verreries, à Vierzon notamment, et d’autres sont susceptibles de trouver du travail dans l’agriculture. L’état d’esprit de la population ouvrière est bon, et il n’y a pas de misère. De plus, la municipalité fait fonctionner le fond de chômage municipal.

En début d’année, dans des conditions similaires, la fabrication avait aussi été arrêtée, et les salaires avaient diminué de 18%. Or le rapport numéro 1317 de la Direction Générale de la Sureté Nationale évoque le fait qu’ Â« il est dans les intentions des dirigeants de cette affaire de diminuer la plupart de ces salaires de 10% lorsque le travail va reprendre. Â»

L’information est de bonne source, puisque le rapport numéro 102 du 26 janvier nous informe que « la direction est entrée en pourparlers avec le personnel, l’informant que tous les salaires seraient diminués de 10% et qu’une dizaine d’ouvriers seraient licenciés. Â». Naturellement le personnel refuse, et la direction propose alors des réductions de salaires échelonnées selon le niveau de revenu, et l’abandon des licenciements. Les ouvriers rejettent cette nouvelle proposition et décident de manifester au matin du 26 janvier dans la cour de l’usine. La direction fait fermer les portes et ne veut recevoir qu’une délégation. Les gendarmeries de Souvigny et de Moulins sont alertées.

​Les relations au sein de l'entreprise

​

Une « information du personnel Â», datée du 6 septembre 1955 donne une idée assez intéressante des relations entre la direction et les ouvriers. Le samedi précédant, « les douches ont été laissées dans un état de malpropreté repoussante. Â» La réaction de la direction est assez classique : menace de fermeture de la salle de douches, et menace de renvoi immédiat de ceux qui seront pris à faire des dégradations. Mais le vocabulaire employé donne une idée de la colère patronale, et de la conception paternaliste de la gestion de l’entreprise : les ouvriers sont des enfants à éduquer. Les auteurs des dégradations sont qualifiés d’  « Ãªtres lamentables Â». Qu’il y ait eu des dégradations n’est pas surprenant, « Ã©tant donné l’état d’abrutissement complet de certains individus travaillant à l’usine… Â». Il va donc de soi que « le premier abruti de ce genre pris à faire des dégradations quelconques à l’intérieur de l’usine sera renvoyé immédiatement. Â» L’emploi d’un tel vocabulaire, sur un document écrit serait tout à fait impossible aujourd’hui !

​

En 1979-1980, période de fermeture, les relations deviennent naturellement très mauvaises. La direction dénonce « l’absentéisme et la sous production pour justifier le déficit Â», et le syndicat, lui, tire à boulets rouges sur la direction : il dénonce les salaires trop bas (la moitié du personnel au S.M.I.C.), la monopolisation des postes par le directeur (« commandes, création, bureau, magasins, salaires, lancement, composition du verre, organisation technique etc.… Â»), la mauvaise organisation technique et commerciale, l’extinction d’un four et le licenciement de 72 personnes…

Puis après le licenciement collectif de décembre 1979, le syndicat dénonce les rumeurs de réouverture, entre le premier mars et le premier juin, rumeurs qui s’avéreront fausses…

Une expertise comptable avait été demandée sur le bilan et le compte d’exploitation de 1978. D’après la CGT, le directeur aurait évoqué par écrit les conclusions de l’expertise. Or ces conclusions n’ont jamais été transmises, pour la simple raison que les honoraires de l’expert comptable, Pierre-Joël Bonté, n’ont jamais été payés (ce que M. Bonté confirme dans un courrier adressé aux membres du C.E.). Il est dès lors facile pour le syndicat de mettre en avant le fait que la direction a menti « depuis toujours Â».

Le syndicat

Un syndicat verrier a été fondé en 1919, et unifié au premier janvier 1936 : le syndicat des Verriers et Similaire de Souvigny. Le syndicat est membre de la Confédération Générale du Travail Unitaire, proche du PCF, et utilise encore le papier à en-tête. La même année, un document émanant du ministère du travail stipule que le syndicat est adhérent de l’Union Locale des Syndicats Ouvriers de Moulins et de la région de Moulins. Le Front Populaire et le mouvement de 1936 ont fortement stimulé l’adhésion au syndicat : 70 membres avant le premier juin, 140 après. Grâce à la signature des Accords Matignon les salaires progressent, les ouvriers vont bénéficier des congés payés en vigueur, et le syndicat a signé un contrat collectif.

La même année a débuté la guerre d’Espagne. En septembre, le trésorier du Syndicat Unitaire des Ouvriers Verriers de Souvigny, Léon Marchais, envoie la somme de 30 Fr. « pour secourir le peuple espagnols (sic) en lutte contre les fascistes Â». Les ouvriers de la verrerie apparaissent bien concernés par ce qui se passe en France et en Europe.

Les statuts du syndicat sont révisés en 1945. Le syndicat est alors adhérent à la Fédération des travailleurs du verre (CGT), et à l’union départementale des syndicats ouvriers de l’Allier .

Apprentissage : la relation avec les jeunes

A la date du 29 janvier 1935 alors que l’embauchage recommence à la verrerie, seuls les petits salariés se sont présentés. Il semble « que les verriers préfèrent ne toucher que l’indemnité de chômage mais tenir la direction de l’usine en échec de façon à l’obliger à renoncer à la diminution des salaires.

La grève va donc durer du 25 janvier 1935 au 12 février et est particulièrement suivie : 100 grévistes, sur 170 employés. Les grévistes finiront par accepter une diminution de salaire de 6 à 8%.

​

La crise de 1929 semble avoir eu des répercussions sur la verrerie de Souvigny. La crise ne touche la France qu’à partir de 1932, et l’absence de commandes, ou l’irrégularité de ces commandes en est vraisemblablement une conséquence.

En 1936, cependant, d’après un questionnaire de l’Union Locale des syndicats, il n’y aurait pas eu de grève à la verrerie.

bottom of page